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  • : Le blog de salvator.dedaj.over-blog.com
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  • salvator dedaj (alias sam)
  • Suis un peu touche à tout, bricolage, guitare, écris & compose des chansons, traduis des chansons anglaises.
Je n'aime pas l'idée qu'il faut être un winner ...beurk
né en Albanie, grandi en Australie, en France depuis '67
  • Suis un peu touche à tout, bricolage, guitare, écris & compose des chansons, traduis des chansons anglaises. Je n'aime pas l'idée qu'il faut être un winner ...beurk né en Albanie, grandi en Australie, en France depuis '67

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"Les larmes de Séléné" (ma participation à un concours de nouvelles sur la fin du monde) 

 

Dimanche 30 mai 2010, à 21:34 Farida Bounouara était debout depuis bien trop longtemps, et ne pensait pas pouvoir se reposer de si tôt, comme tous ceux de son service, d’ailleurs. C’était la première fois qu’elle passait autant de temps loin de sa fille, et elle s’en voulait, mais savait qu’il ne pouvait en être autrement. Et puis la personne que le département avait dépêchée chez elle pour s’en occuper afin qu’elle puisse se consacrer à 100% au problème actuel, était tout à fait à la hauteur. Elle dirigeait le département TERRaIN (Terrorism and Internet) composé d’une équipe chargée de démasquer d’éventuels terroristes par l’Internet. Ses cyber sentinelles étaient formelles : quelqu’un s’est procuré de quoi fabriquer une petite bombe atomique, et à priori dans un pays qu’on peut difficilement qualifier d’ennemi de l’occident, puisqu’il s’agit de la Suisse. Difficile d’imaginer que c’était pour forcer des coffres à Zurich ! Même une petite bombe nucléaire, posée au bon endroit, peut faire des millions de morts. Le 11 septembre serait vite oublié. … / …

 

Bernard McEddon, chercheur et professeur de Physique Nucléaire à Jussieu, était quelqu’un de naturellement optimiste, et même si tout n’avançait pas aussi vite qu’il l’espérait, il sentait qu’il touchait au but et que le rêve de l’humanité pour de l’énergie en quantité illimitée allait bientôt se réaliser. Les centrales à fission nucléaire ont eu leur temps de gloire, mais avec les accidents de Three Mile Island et Tchernobyl, et les déchets dont on ne sait que faire, les recherches se sont orientées vers la fusion nucléaire, beaucoup plus difficile à obtenir, mais oh combien plus efficace. Le Professeur McEddon, lui, suivait une autre voie : celle de la collision matière - antimatière, qui transforme la moindre particule en énergie. En considérant le fameux e = mc2, on arrive à une production d’énergie ultime, puisque le moindre atome de matière et d’antimatière se transforme intégralement en énergie : on ne peut faire mieux ! Il avait l’extrême privilège de pouvoir utiliser quelques heures par mois l’installation la plus puissante au monde, le LHC (Large Hadron Collider) du CERN (Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire), à la frontière Franco-Suisse.

D’aucuns évoquent régulièrement le risque de créer des trous noirs qui engloutiraient la terre. Même si, contre toute attente, ces trous noirs se produisaient, ils seraient tellement minuscules, qu’ils ne pourraient se développer. Et les énergies mises en œuvre dans le LHC sont beaucoup plus faibles que les phénomènes naturels qui se produisent continuellement dans l’espace. Il était d’autant plus à l’aise que des collisions de particules matière – antimatière se produisent déjà dans l’atmosphère lors des éclairs accompagnants les orages, sans conséquences dramatiques. Bref, les choses se présentaient bien ! Le véritable problème est qu’on ne trouve pas des particules d’antimatière comme ça dans la nature. Il faut les fabriquer, et l’énergie nécessaire à leur production est totalement disproportionnée par rapport à l’énergie récupérable. Pourtant avec les nouvelles formules développées en collaboration avec deux de ses plus brillants élèves, il était certain de pouvoir résoudre ce dilemme. Pour tester sa théorie, il devait modifier légèrement les réglages des aimants supraconducteurs qui guident les faisceaux de particules les uns contre les autres. S’il arrivait à bien régler la vitesse des collisions, avec une parfaite synchronisation de récupération et de stockage d’une partie des antiparticules produites, il pourrait utiliser le reste comme source d’énergie pour créer d’autres antiparticules. Et ainsi de suite, jusqu’à obtenir suffisamment d’antimatière pour que le phénomène soit autoalimenté, et que la production se fasse sans apport d‘énergie extérieure. …/…

 

Michael cherchait à partager sa passion pour l’astronomie avec Kevin, son fils de 12 ans, il avait installé son télescope de 200 mm d’ouverture derrière sa maison dans l’Outback Australien, où la pollution lumineuse n’existait pas. Il l’avait pointé sur la planète Saturne pour que Kevin s’émerveille des beautés célestes. - Viens fiston regardes quelque chose de vraiment magique ! Mais en s’approchant, Kevin fit bouger le télescope, qui ne visa plus Saturne. - Désolé P’pa, je ne le vois pas, tout ce que je vois c’est une sorte de pierre sombre qui tourne sur elle-même. - Pousse-toi une minute que je jette un coup d’œil ! Ah, oui, c’est sûrement un astéroïde. Il y en a plein entre les orbites de Mars et de Jupiter. Il expliqua la position des planètes qui tournent autour du soleil, et lui parla de la ceinture d’astéroïdes. - Certains pensent même qu’il s’agit d’une ancienne planète qui aurait explosé. Il releva néanmoins les coordonnées astronomiques de l’objet et remit le télescope en direction de Saturne, puis attrapa son fils en lui chatouillant les côtes. - Maintenant, si tu bouges encore le télescope, je t’attache les mains derrière le dos ! Et c’est en riant que Kevin observa la beauté du géant gazeux, et ses célèbres anneaux. Après une heure et demie passée à initier son fils à l’astronomie, Michael n’arrivait pas à oublier l’astéroïde. Sa position dans le ciel l’intriguait. Le lendemain, il téléphonait à l’Anglo-Australian Observatory près de Sydney pour en savoir plus. Leur réponse le rassura. L’astéroïde, qu’on avait baptisé Rido, avait été décelé par plusieurs observatoires à travers le monde. Il était sous surveillance, car il se dirigeait vers la terre, mais il n’y avait aucune chance qu’il heurte notre planète. Les calculs de trajectoire le faisaient passer tout près, au point où il allait falloir déplacer certains satellites, mais assez loin pour qu’il continue son chemin. Heureusement d’ailleurs, parce que, vu sa taille… Michael consulta des sites astronomiques, où on donnait plus de détails. Après avoir dépassé la Terre, Rido se dirigerait vers la Lune, où la Gravité de celle-ci agirait comme une fronde gravitationnelle (technique d’accélération utilisée pour toutes les sondes envoyées vers l’espace profond), le propulsant à toute vitesse droit vers le soleil. Ce que personne ne voyait, c’est le petit compagnon de Rido, astéroïde trop petit pour être vu de la terre. …/…

 

Farida buvait café sur café. Le TERRaIN, installé dans un sous-sol sans fenêtres, était composé d’une vingtaine d’informaticiens de très haut niveau, spécialisés dans la recherche d’informations et le décryptage. Ils étaient assis devant leurs ordinateurs autour de tables disposées en un grand carré, car elle estimait qu’ils devaient pouvoir s’échanger des informations de vive-voix. Son bureau à elle était juste un box sans prétention, dans un coin près de la porte d’entrée. Des informations lui arrivaient en permanence, mais elle avait du mal à identifier ce qui était important pour cette affaire de ce qui ne l’était pas, voire, sans intérêt. Andrew, un des techniciens, entra dans son bureau avec précipitation, en oubliant de frapper à la porte, avec le rapport d’une de leurs équipes d’intervention : - On l’a trouvé ! Enfin une bonne nouvelle ! Après avoir intercepté des conversations des services des Douanes Suisses concernant un habitant du sud du pays qui aurait reçu des marchandises étranges sans les avoir déclaré, le TERRaIN avait dépêché une équipe sur place pour vérification. En effet, la nature des marchandises en question correspondait à leurs recherches. Les hommes du TERRaIN se sont introduits dans sa maison où ils ont trouvé les emballages des pièces, ainsi que des plans pour fabriquer une bombe atomique d’une puissance relativement faible. Ils ont même détecté la présence de radioactivité. Etant donné sa pudeur, Farida ne pouvait pas prendre Andrew pour le serrer contre elle, mais ce n’était pas l’envie qui lui manquait. L’euphorie fut de très courte durée. Maria, qui travaillait en binôme avec Andrew, arriva à son tour en courant, et passa la tête dans l’entrebâillement de la porte : - Il y a du nouveau : le suspect vient de décoller dans un jet privé de l’aéroport de Lugano en direction de la frontière française, et il y a fort à parier que son bricolage soit à bord. - Quel est le niveau de certitude? - D’après les conversations, et les caméras de surveillance de l’aéroport, je crains qu’il y ait peu de doutes ! - Merde, merde, merde ! C’était la première, la deuxième et la troisième fois de sa vie qu’elle utilisait ce mot. Il n’était pas question de demander à ses supérieurs le droit d’intervenir : les minutes étaient comptées, et c’est les yeux pleins de larmes qu’elle déclara : - Abattez-le. …/…

 

Peter Koch, riche industriel suisse, avait l’esprit très clair sur sa mission. Après avoir suivi de près les positions de la Fraternité Sacerdotale St-Pie X, il reçut une illumination : Dieu allait punir certaines villes, gangrénées par la débauche, comme il l’avait fait pour Sodome et Gomorrhe, en commençant par Paris. Et c’est lui, Peter Koch, qui serait Son bras armé. Il a fait fabriquer dans ses usines tout ce dont il avait besoin pour assembler correctement les pièces achetées sur internet avec celles obtenues grâces à ses contacts dans l’ancienne URSS, sans que personne ait la moindre idée à quoi ça pouvait servir. Son avion privé avait décollé de Lugano et survolait la frontière française, en direction de Paris, quand un rayon laser en provenance d’un satellite militaire toucha l’aile droite de son avion. Il se mit à genoux pour prier mais se voyant perdu, il fit fonctionner sa bombe, transformant son avion en une gigantesque boule de feu, juste au-dessus de l’endroit où Bernard McEddon était en train de faire se rencontrer des particules et des antiparticules, pour offrir à l’humanité une énergie sans limite. …/…

 

A 100 mètres sous terre, le tunnel de l’accélérateur était relativement à l’abri, mais les installations techniques l’étaient moins. Les réglages d’une précision extrême du professeur McEddon se sont envolés, et les aimants supraconducteurs émirent un champ magnétique faramineux, avant de fondre. Ce champ magnétique déséquilibra, pendant quelques minutes, le champ magnétique terrestre juste quand Rido et son petit compagnon, composé à 98% de fer, se trouvaient au plus près de la Terre. Le petit compagnon de Rido changea brutalement de direction, et entra en collision avec lui, puis tous les deux continuèrent leur voyage vers la Lune, quoique sur une trajectoire légèrement différent de celle initialement prévue. Ils contournèrent la Lune d’un peu trop près, et l’effet de fronde gravitationnelle l’accéléra certes, mais pas en direction du soleil. La force colossale du champ magnétique avait perturbé le fonctionnement des appareils électroniques à travers le monde. On connaissait les perturbations et les pannes générées lors des orages magnétiques (aurores boréales et australes), mais là, on avait affaire à des bouleversements autrement plus marqués. Du coup, tous les grands télescopes du monde, commandés électroniquement, ont du subir des réparations, ou au moins des réinitialisations, ce qui allait prendre plusieurs heures, voire plusieurs jours. Qui plus est, dans les pays riches, où l’électronique est omniprésente, tout le monde dut gérer un environnement en complet désarroi, l’obligation de faire réparer ou régler leurs ordinateurs, connections internet, téléviseurs, paraboles, radios, GPS, etc…

 

Les astronomes amateurs avaient donc bien d’autres « chats à fouetter » que de contempler le ciel. C’est ainsi en toute discrétion que Rido et son petit compagnon fonçaient droit sur la Terre, à une vitesse qui ne laissait aucune chance à celle-ci de supporter l’impact. Bernard McEddon, fut, bien malgré lui, à l’origine d’une quantité d’énergie inimaginable, provenant d’une collision de matière - matière, mais malheureusement, inexploitable. De toute façon, il n’y avait plus personne à qui ça aurait pu servir. A partir de ce jour là, il y avait une nouvelle ceinture d’astéroïdes, entre Mars et Venus, ainsi qu’une orpheline, la Lune, là où se situait auparavant une planète bleue, mais Michael et Kevin n’étaient plus là pour les contempler.

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